Speaker
Description
Le Maroc est un pays essentiellement rural qui dispose d’une grande variété de modèles d’architectures traditionnelles locales. Le mode de production traditionnel est conçu par des structures sociales dans lesquelles l’homme maîtrise le processus de production de son logement grâce à un savoir-faire séculaire transmis de génération en génération. Les formes architecturales, matériaux locaux, systèmes constructifs... étaient décidés en fonction des préoccupations intuitives de l’habitant : intégration au paysage, adaptation au changement du climat, confort, fonctionnalité, et gestion des risques naturels.
Les régions de l’Atlas et les vallées présahariennes du Maroc représentent des lieux de mémoire illustrés par des villages communautaires, des habitations traditionnelles locales, des kasbahs et des greniers collectifs. Ce patrimoine exceptionnel témoigne d’une culture et d’une tradition lointaines, demeurant le symbole le plus représentatif de l’architecture vernaculaire du pays. La vallée d’Ait Bouguemez présente un modèle vivant de la typologie vernaculaire montagnarde que la société a conçu en alliance forte avec son environnement en l’adaptant à ses besoins fonctionnels et défensifs, et aux rigueurs du climat, l’architecture de la vallée est fortement ancrée dans une tradition millénaire mettant en œuvre des modèles constructifs uniques, l’usage des matériaux locaux, et un savoir-faire ancestral riche, transmis de génération en génération.
Toutefois, face aux dynamiques contemporaines de modernisation et d’urbanisation, la région subit des transformations profondes liées aux nouvelles aspirations et aux exigences de la modernité. Les constructions ancestrales sont ainsi mal entretenues et laissées à l’abandon, laissant place à une homogénéisation du paysage bâti. Les nouvelles constructions inspirées de modèles standardisés s’implantent sans considération pour la topographie, les ressources locales et surtout le climat du Haut Atlas. Ainsi une vallée autrefois profondément connectée à son environnement se retrouve peu à peu rompue de ses repères écologiques et de son identité culturelle.
Afin de répondre aux enjeux soulevés, l’étude adopte une méthodologie mixte, qui associe étude théorique, prospection et enquête de terrain, analyse du modèle architectural local (typologie du bâti, éléments constructifs et décoratifs, matériaux de construction…), identification des pathologies des ouvrages architecturaux et l’évaluation de leurs vulnérabilités face aux changements climatiques.
Le bâti vernaculaire de la vallée, longtemps façonné par un savoir-faire local, connait aujourd’hui une mutation profonde. De nombreuses constructions s’élèvent ou se transforment sans encadrement technique ni réglementaire et institutionnel, accentuant ainsi leur vulnérabilité aux différents aspects climatiques : infiltrations dans les murs, remontées capillaires, ruissellement sur les façades, absence de drainage, enjeux d’orientation…La population locale recourt fréquemment à des solutions de réparations ponctuelles : enduits cimentés, couvertures dépareillées, menuiseries métalliques, ce qui altère l’authenticité et dégrade les performances hygrothermiques du bâti. Certains propriétaires choisissent de démolir totalement l’ancien pour reconstruire en maçonnerie moderne, extrêmement énergivores, inadaptée au climat de haute altitude et en contraste avec le paysage, et surtout une option onéreuse que la plupart des familles ne peuvent durablement assumer. L’objectif fondamental de cette étude et de de repenser les modes de construction en s’inspirant, perpétuant réinventant et reconduisant les potentialités des pratiques traditionnelles, pour instaurer de nouveaux modèles architecturaux résilients qui s’inscrivent dans une approche environnementale, écologique et durable. À la recherche d’un équilibre entre le passé et le présent.
Mots-clés : Patrimoine, architecture vernaculaire, changement climatique, résilience territoriale, développement durable.